Je ne sais pas trop l'âge que j'ai, sans doute 6 - 7 - 8 ans, j'accompagne ma mère au jardin, celui qui est à une centaine de mètres de chez nous, après le pont. Ce jardin est en pente, surement très difficile à travailler, ma mère y passe du temps. Je m'amuse dans les allées. La petite fille des voisins me voit et à chaque fois que je viens ici, elle se poste à la barrière tout en haut, me regarde. Un jour j'ai du oser m'approcher, elle d'un côté du grillage, moi de l'autre. Pendant assez longtemps, c'était comme ça. On devait se parler, se raconter des choses. Nos familles ne s'entendaient pas, c'était des vieilles histoires du passé qui empêchaient une communication normale. Elle était la petite dernière après trois grands. Moi j'étais aussi la dernière. Personne pour jouer. On aimait vraiment se voir. Puis petit à petit, j'ai eu le droit de passer la barrière, d'aller chez elle. Nous avons passé une partie de notre enfance ensemble. Pas trop à la maison. Surtout dehors. Je ne l'ai jamais oubliée. Elle, je ne sais pas. On ne s'est pas beaucoup revu. La dernière fois, c'était à l'enterrement de sa mère. J'ai été émue de la revoir.

 

J'ai écrit cela l'an dernier. L'autre jour, en passant en voiture dans une petite commune, pour aller voir ma maman, j'ai aperçu entre deux maisons une petite fille qui parlait avec une autre petite fille. Entre elles, il y avait un grillage, elles y accrochaient leurs doigts. Soudain, j'ai repensé à en haut du jardin, sauf que le terrain était plat. J'ai eu l'impression que c'était elle et moi il y a presque 50 ans.